CINQUANTE ANS DE LA DISPARITION DE FREINET
UNE ETERNELLE GUIRLANDE BRILLANTE
( En citant un livre bien connu de P. Hofstatter, 'Gὅdel Escher Bach')
C. Freinet a traversé deux guerres mondiales: de la première, il a rapporté une blessure au poumon; pendant la seconde, il a été emprisonné dans un camp de concentration de la République de Vichy.
Il a également combattu dans sa situation scolaire, et en a subi les conséquences, les préjugés, la stupidité, les réactions de ceux qui ne pouvaient pas supporter un enseignement qui voulait conduire tous les enfants d'un pays au même niveau avec les mêmes droits et les mêmes chances de réussite éducative.
Il a accueilli dans son école les enfants des républicains espagnols.
La paix, pour lui, c’était l'occasion d'une élévation culturelle, morale et civile pour tous.
Il a donc dénoncé la «grande tromperie» qui a amené des millions de personnes analphabètes ou peu instruites à combattre et à s'entre-tuer pour des faux idéaux.
L'information, l’analyse critique des manuels scolaires, des messages médiatiques, offrent un outil politique pour l'émancipation du jugement et sont pour lui le fondement d'une éducation véritablement démocratique et de paix, pour la paix.
L'éducation à la paix est atteinte s'il est possible aux individus, dès un âge précoce, de pratiquer la libre expression de leur pensée, si on leur donne la possibilité de choisir et de décider de manière autonome, si l’on travaille à la libération de nombreux conditionnements, si l’on favorise une ouverture à la participation à l'école, à l'action collective, à la coopération, à l'entraide..
Et aussi, si l’on ne superpose pas aux différences et aux stratégies personnelles un modèle d'enseignement unique et unimodal; si l’on donne aux élèves le temps de construire / de se construire / de construire ensemble.
La guerre, disait le regretté inspecteur italien Sergio Neri, exige rapidité, vitesse, immédiateté tandis que, telle que la paix, l'éducation est lente, longue à se répandre, à produire des changements dans les attitudes, les mentalités et les cadres personnels de référence.
La pédagogie Freinet consiste en des actes, des faits, des outils concrets: «matérialiste» comme il l'appelle. Mais le projet de croissance et le développement individuel qui s'en dégage est hautement spirituel: chacun devrait être en mesure de choisir sa propre vie, et il n'y a pas de niveaux et de stades de la vie inférieurs ou supérieurs sur lesquels repose l’échafaudage social ( voir les Invariants).
Aujourd'hui, nous nous concentrons sur le mérite, le talent, l'excellence. Nous nous hâtons de faire ressortir les compétences personnelles des plus doués par des effets qui se prétendent «sauveurs» pour une société en crise, en proie à la confusion et à la contrainte. Mais l'objectif principal de l'école doit être de faire émerger de chacun ses compétences, ses points de références, ses valeurs par la méthode naturelle, ne laissant personne en arrière.
Et cela remet en question la nécessité d'une attitude politique, les choix auxquels l'enseignant ne peut ni faire face, ni prendre en compte dans son profil professionnel. Sans un horizon éthique et politique commun, il ne peut y avoir une véritable éducation, ni un éducateur authentique .
Freinet est très proche de Milani, Freire, Dewey, Korczack, de tous les éducateurs qui, au le siècle passé, se sont souvent engagés en personnes concernées.
On ne peut pas considérer comme véritable éducateur celui qui ne sent pas la valeur politique de son intervention, qui ne la partage pas avec les autres, qui ne la demande pas à d'autres.
Les batailles syndicales, politiques, culturelles, éducatives de Freinet sont le témoignage de son implication.
Après Freinet, on ne peut penser à l'éducation qu'en termes d'une réponse unifiée d’engagement pédagogique et culturel, conforme aux besoins éducatifs, ainsi qu’en termes de recherche de qualité de l’offre éducative dans l'engagement politique.
Giancarlo Cavinato secrétaire national du MCE