Enviado por Karim Nikiema el Vie, 06/04/2012 - 12:31

La RIDEF de Nantes nous propose de réfléchir sur la manière dont la pédagogie Freinet est une réponse à de nouveaux défis pour la planète. 

Le XXIème siècle, caractérisé par la vitesse, le changement et la diversité de l'information, oblige à la transformation du paradigme école. L'école comme une instance de transmission du savoir a été remplacée par une société scientifique qui tisse les frontières disciplinaires et le renforcement des objets communs de la connaissance. Aujourd'hui, il ne suffit pas de présenter aux élèves la connaissance construite. Il est nécessaire de leur apprendre à faire face à un monde incertain où la mondialisation oblige à prendre une position face à l'acceptation ou la critique de nouveaux concepts, de nouvelles méthodes et technologies. La pédagogie du sens commun de Freinet est plus que jamais indispensable pour que les étudiants puissent comprendre le monde.

D'autre part, jamais dans l'histoire de l'homme on a développé une telle connaissance du comportement, de la pensée et de l'affectivité humaine. Près de cent ans de construction psychologique et épistémologique exigent que l'école ouvre ses portes et que nous transformions nos stratégies d'enseignement à partir de ce qui est connu sur la manière d'apprendre, de sentir et de se socialiseer. Les enfants ont besoin des espaces affectifs pour aborder la connaissance et le plaisir véritable indispensable à tout apprentissage. Dans de nombreuses écoles de nos pays, on écoute les rires des élèves uniquement pendant les récréations ou durant les vacances scolaires.
 
Un nouveau défi proposé à l'école aujourd'hui. Nous avons découvert que l'une de nos plus grandes richesses est sa diversité. Les différences ont cessé d'effrayer, et nous apprenons que tous avons des cultures, des valeurs, des aptitudes et des connaissances hétérogènes qui font de nous un potentiel pour d'autres êtres humains. Être unique devient une valeur fondamentale que l'école doit protéger. Pour tout cela, l'école a ouvert timidement ses portes, y compris à d'autres langues, d'autres compétences, d'autres cultures, d'autres façons d'apprendre et d'être. Les changements économiques et politiques dans le monde, la migration à la recherche de nouveaux emplois et de meilleures conditions de vie, ont forcé les écoles à ouvrir leurs portes aux enfants et aux jeunes d'autres cultures, d'autres langues et d’autres coutumes. Mais pourtant, dans de nombreuses classes encore de nos pays, la diversité est perçue comme effrayante et une menace. 
Aujourd’hui on n’attend plus d'
aller à l'école pour commencer à apprendre ; les enfants d'âge préscolaire arrivent dans leur premirèe classe avec des connaissances acquises qui sont toujours le point de départ pour de nouvelles constructions cognitives. Cette démocratisation de la connaissance a généré des exercices publics pour obtenir les opinions, les préoccupations et les besoins de nos jeunes, leurs familles et leurs communautés. Les enseignants ne sont pas les possesseurs de la vérité, une société critique vit dans leurs classes. Les connaissances que les enfants acquièrent en dehors de la salle de classe, viennent aujourd'hui alimenter les espaces de conférences enfantines, les assemblés scolaires, pour diversifier les points de vue qui coexistent au sein de l'école. Cependant, pour beaucoup d'autres enseignants, la parole est toujours leur privilège personnel : leur idéal demeurent une enfance et une jeunesse muettes, qui répètent dogmatiquement ce qu'ils disent et qui doit l'accepter comme unique vérité. 
Nous nous sommes faits l'écho d'autres voix qui se rassemblent au-delà de nos frontières, en portant les interrogations spécifiques à l'école. Bien que l'école ait étendu son domaine, la pertinence de ce qu'elle apprend, est discutable. 

Les différentes réunions internationales pour les enfants et l'éducation, telles que la Conférence mondiale sur l'Education pour tous en 1990 (Jomtien, Thaïlande), le «Sommet mondial pour les enfants» en 1990 et le "Forum mondial sur l'éducation" 2000 (Dakar, Sénégal) ont mis en évidence l'urgence de répondre aux besoins éducatifs fondamentaux des enfants pour améliorer leur qualité de vie. Dans ces rassemblements, il a été noté qu'une part énorme de la population n'a toujours pas la possibilité d'entrer dans l'école et qu'il y a encore beaucoup de gens qui, bien qu'ils aient terminé l'enseignement de base, n’ont toujours pas acquis les connaissances indispensables pour interagir avec leur environnement et  résoudre les problèmes quotidiens de manière efficace. La raison de l'échec scolaire est liée au hiatus qui persiste entre les besoins éducatifs fondamentaux des individus et les fins éducatives des différents plans et programmes. Autrement dit, «l'école n'est pas prête à développer pleinement les compétences nécessaires pour vivre et travailler dans la dignité, participer pleinement au développement, améliorer la qualité de vie, prendre les décisions et continuer à apprendre." C'est dire qu'une une grande partie de ce qui est enseigné à l'école ne peut pas être utilisé pour améliorer la qualité de la vie quotidienne.

Toutefois, les accords internationaux qui ont émergé du Forum Mondial n'ont pas abouti à la consolidation de l'école publique. Dans beaucoup de nos pays, les budgets de l'éducation ont été réduits, la reconnaissance de la valeur du travail des enseignants est remise en question et les examens externes à l'école ont augmenté, provoquant une grande méfiance des enseignants en leur refusant le droit et la capacité d'évaluer leur propre travail. 
Après plus de 50 années d'éducation coopérative, la valorisation de diverses origines culturelles de la pédagogie de Célestin Freinet, nous devons reconnaître que nous avons beaucoup appris dans les petites communautés avec les éducateurs, les mères et les pères en milieu rural. Nous avons appris dans notre voyage hirondelles d'accompagnement des travailleurs migrants. Nous avons appris dans l'enseignement spécial avec des enfants handicapés, dans le travail avec les enfants travailleurs et ceux qui hantent les rues de nos villes. Aujourd'hui, nous savons ce qui est au-dessus des plus grands défis, étant donné les difficultés extrêmes d'innover pour transformer l'école et lui donner une autre direction. Il apparaît également que l’échec de l’école traditionnelle et dogmatique a été le point de départ pour un changement vers la pertinence. 
Enfin, regardons vers notre maison commune, la Terre, pour nous rendre compte que progressivement nous perdons notre environnement naturel, nos forêts, notre biodiversité. Le changement climatique menace la paix d'un grand nombre dans diverses parties du globe. L'utilisation aveugle de nos ressources appauvrit notre environnement. 
C'est pourquoi aujourd'hui, nous invitons les membres de la FIMEM à lire attentivement les lignes directrices de la Charte de la Terre comme une réflexion sur notre maison commune: 
• Respecter et prendre soin de la vie dans toutes ses diversités;
• Bâtir des sociétés démocratiques, justes, participatives, durables et pacifiques.
• Protéger et rétablir l'intégrité des systèmes écologiques de la Terre, empêcher les dommages causés à l'environnement et adopter des modes de production et de consommation qui préservent les capacités régénératrices de la Terre, les droits humains et sociaux de la collectivité. 
• Travailler pour une justice sociale et économique; éradiquer la pauvreté et assurer un développement durable, l'accès universel à l'éducation, la santé, le respect d'une vie digne pour tous. 
• Travailler pour la démocratie, la non-violence et la paix. 
Pour fermer ces réflexions je cite la fin de cette Charte : 
Faisons en sorte que notre époque passe à l’histoire comme l’éveil d’une nouvelle forme d’hommage à la vie, la ferme résolution d’atteindre la durabilité, l’accélération de la lutte pour la justice et la paix et l’heureuse célébration de la vie.
Teresita Garduño (mai 2010)